D’Octobre à la chute de l’URSS, problématique du rapport de force et de la superstructure

D’Octobre à la chute de l’URSS,

problématique

du rapport de force

et de la superstructure

 

 

Récemment, le camarade blogueur  de « Reconstruction Communiste » (France)

a pris l’initiative de republier notre article

Un siècle après la Révolution d’Octobre 1917,

comprendre l’histoire de l’URSS

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2017/08/14/un-siecle-apres-la-revolution-doctobre-1917-comprendre-lhistoire-de-lurss/

 

Republication amputée de quelques considérations qui, supposons nous, risquaient d’indisposer ses camarades du groupuscule OCF envers lequel il manifeste le plus souvent une sympathie certainement sincère, venant de sa part. Bien entendu, cela n’en change pas, pour l’essentiel, le sens, mais selon une habitude que d’aucun trouvent fâcheuse de notre part, ce fut une occasion de plus d’approfondir et de chercher à comprendre ce qui nous sépare de ces camarades…

 

Selon la théorie marxiste, il y a bien un rapport dialectique entre infrastructure et superstructure, mais ce rapport, basé sur l’observation des faits, de l ‘évidence sociale et économique , dit que le mouvement essentiel se fait de l’infrastructure vers la superstructure.

C’est fondamentalement l’infrastructure, la base économique et sociale, les rapports de productions, qui conditionnent la superstructure, à savoir l’idéologie, la culture, le droit, l’organisation politique, dont l’État, et non l’inverse.

Évidemment, la dialectique implique aussi un mouvement en sens inverse, à savoir que la superstructure influe en retour sur l’infrastructure, mais ce mouvement n’a que très rarement une influence dominante, et surtout, durable.

Si l’on prends l’exemple actuel du capitalisme monopoliste d’Etat, on voit bien que l’influence dominante est celle que les monopoles exercent sur l’État, et même carrément le fait qu’ils le contrôlent quasi entièrement, en réalité.

En retour, l’État agit bien sur les infrastructures économiques, mais principalement, sinon quasi exclusivement, dans le sens de l’intérêt des monopoles.

Le cas inverse le plus flagrant est l’histoire tragique, et pour cause, du « Grand Bond en Avant » de Mao… Dans une Chine encore essentiellement pré-capitaliste, penser qu’un « mouvement » essentiellement idéologique et administratif pourrait changer l’infrastructure économique au point de faire de la Chine une puissance économique supérieure à la Grande-Bretagne (sic), et évidemment, à l’URSS, tant qu’à faire, et le tout en quelques mois, tenait très objectivement du suicide collectif, et c’est bien ce qui avait commencé à se produire, si ce n’avait été arrêté par l’évidence de l’échec que Mao a malgré tout trainé à admettre, et à demi, en fait, poursuivant jusqu’au bout la politique absurde des « Communes Populaires »…

En pratique, dans le développement de la vie sociale et économique, et particulièrement dans la lutte des classes, pour qu’il y ait un changement notable dans le rapport de forces, il faut donc qu’il y ait un changement également significatif partant de la base, de l’infrastructure, et suffisamment important pour modifier la superstructure, et notamment le pouvoir politique.

C’est le cas typique de la Révolution d’Octobre. Octobre survient sur le terrain miné par Février et par l’effondrement de l’État tsariste suite à la défaite de l’Empire russe sur le front. Mais ce qui est plus fondamental encore, c’est que cet effondrement fait suite à l’effondrement des infrastructures traditionnelles de l’Empire, et notamment rurales et agricoles, ce que l’on a vu à l’occasion de

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2017/07/15/de-juillet-a-octobre-ou-comment-la-petite-bourgeoisie-voit-les-revolutions/

L’unité ouvrière et paysanne a pris d’autant plus de force que l’industrie russe naissante avait elle même une implantation en grande partie rurale et que nombre d’ouvriers étaient également paysans et membres de communautés villageoises type mir.

Une grande partie de la bourgeoisie et de la petite bourgeoisie s’était déjà heurté à l’absolutisme pour tenter de moderniser l’infrastructure économique russe, mais se trouvait incapable de réorganiser l’État sans le soutien des classes populaires et ne pouvait que le perdre, étant incapable de répondre favorablement à ses revendications économiques et démocratiques les plus basiques.

Aujourd’hui, on peut voir que, selon une terminologie actuelle, la « fenêtre de tir » pour que la superstructure idéologique développée par les bolchéviques s’impose comme une évidence était en réalité assez courte, et qu’il a fallu ensuite agir très rapidement et avec beaucoup de détermination pour maintenir le rapport de forces, longtemps chancelant, malgré la poussée d’une partie essentielle de la base, assez composite, en réalité.

C’est la capacité des bolchéviques à recréer des infrastructures là où ne se trouvait plus que le chaos et l’anarchie, qui a permis de conserver ce rapport de force et de le développer, en unifiant, de fait, beaucoup d’éléments composites qui y voyaient une renaissance sociale, économique, et même nationale, indépendamment de son contenu idéologique, qui, lui, en fait, unissait essentiellement l’avant-garde.

Ce type d’unité large s’est retrouvé face au chaos généré par l’agression fasciste.

Peut on en conclure, pour autant, que sous l’influence de cette avant-garde, toutes les infrastructures de l’URSS avaient été radicalement transformées et que l’idéologie révisionniste « moderne » y a en quelque sorte poussé comme un champignon après la pluie, sans y avoir aucune base sociale et économique ?

C’est pourtant bien ce qu’ont soutenu les camarades de l’OCF, notamment WH et apparemment approuvé par VG, dans le débat récent.

Autrement dit, un changement majeur de rapport de force dans la superstructure, et notamment dans l’État, se serait produit sans qu’il n’y ait eu quasiment le moindre changement préalable dans les infrastructures… Une accumulation de forces purement « idéologique », selon eux, sans base sociale et économique qui lui soit propre…

L’effet de survivance de l’idéologie ancienne peut évidemment avoir une importance considérable, l’effet d’encerclement des pays impérialistes aussi, mais cela peut-il être suffisant pour déterminer l’apparition d’une nouvelle bourgeoisie susceptible de renverser le rapport de forces sans avoir aucune base économique intrinsèque ?

Cela reste un renversement complet du mouvement dialectique de la lutte des classes et suppose donc de revoir entièrement ce concept !

Je ne pense pas que les camarades de l’OCF aient des intentions délibérément révisionnistes, mais ils se fient assez aveuglément, semble-t-il, à leurs sources albanaises anciennes.

Faut-il pour autant incriminer ces sources elles-mêmes de révisionnisme ? Certainement pas au sens du révisionnisme « moderne » qui mène au rétablissement de l’économie de marché et/ou à la collaboration avec l’impérialisme… !

 

 

Mais le fait est que si l’on retrouve bien une telle conception dans ces sources, elle ne manque pas d’y être exprimée avec une grande ambiguïté, qui en relativise précisément le principe le plus discutable…

On l’a dans un exposé datant de 1980, et qui s’appuie, à ce propos, essentiellement sur une citation d’Enver Hoxha, tirée, quant à elle, du rapport du 6ème Congrès du PTA en 1971 :

http://www.enverhoxha.info/_books/z6m4jRAPPORT%20PRESENTE%20AU%206%20CONGRES%20DU%20PARTIE%20DU%20TRAVAIL%20D%20ALBANIE.doc

« Le changement du caractère du parti et de l’Etat, la transformation contre-révolutionnaire dans le domaine de la superstructure politique et idéologique ne pouvaient pas ne pas conduire aussi à la modification de la base économique du socialisme. »

Dans l’exposé de 1980 elle est en quelque sorte non pas le début, mais bien le pivot de l’introduction, sa justification politique et idéologique, quant au fond, en fin de compte :

http://www.northstarcompass.org/french/nscfr53/dossier.htm

(Incidemment, ce document vient d’être republié, tel quel, simplement réédite en PDF, par le groupuscule maoïste « Unité Communiste-Lyon ».)

Le Caractère Capitaliste des Rapports de Production en Union soviétique

Réimprimé de Albanie Socialiste
Journal de l’Association d’Amitié Indo-Albanaise
Numéro 14, juillet 1980

Par Aristotel Pano et Kico Kapetani

« La société soviétique, a dit le Camarade Enver Hoxha au 7ème Congrès du parti, est devenue bourgeoise jusque dans ses cellules les plus minuscules, le capitalisme a été restauré dans tous les domaines. » (Enver Hoxha, Rapport au 7ème Congrès du PTA, p. 215). Cette conclusion de notre parti est le résultat d’une analyse approfondie des faits concrets, des aspects et des directions du processus entier du rétablissement du capitalisme en Union soviétique et dans les autres pays révisionnistes.

Comme c’est connu, le processus de la restauration du capitalisme en Union soviétique et dans les autres pays révisionnistes a commencé en premier lieu par le changement du caractère du parti et de l’État, avec la transformation contre-révolutionnaire dans le domaine de la superstructure politique et idéologique, avec la trahison des enseignements du marxisme-léninisme et de ses enseignements sur la lutte des classes. En conséquence, la dictature du prolétariat a été transformée en la dictature de la bourgeoisie, une dictature fasciste féroce de la nouvelle bourgeoisie révisionniste et l’État socialiste Soviétique a été transformé en un État social-impérialiste.

Mais, bien que le processus de la dégénérescence capitaliste en Union soviétique et dans les autres pays révisionnistes ait commencé avec les transformations contre-révolutionnaires dans le domaine de la superstructure, cela n’a pas dégénéré spontanément, à l’extérieur et indépendamment des rapports de production, isolé de l’intégralité de la structure économique et sociale. Les rapports socialistes de production dans ces pays, particulièrement les rapports dans le domaine de la distribution, ont été violés sous plusieurs aspects et directions séparés. A travers l’extension du système de bonus et, en général, l’utilisation considérable de stimulants matériels supplémentaires, les conditions ont été créées pour la naissance d’écarts et de disproportions dans le domaine de la distribution, pour la création de la couche des bureaucrates et des technocrates, qui, comme le temps l’a confirmé plus tard, est devenue l’appui social principal des cliques révisionnistes qui ont usurpé le pouvoir du prolétariat dans ces pays.

Donc c’est un cas d’interdépendance réciproque et de connexion proche entre la dégénérescence de la superstructure et celle de la base, dans lequel une a conduit l’autre en avant, dans lequel chacune a encouragé l’autre, jusqu’à ce que finalement elles aient pris leur forme capitaliste finale, jusqu’à ce que les transformations capitalistes aient été effectuées dans toutes les sphères de la vie politique, idéologique, économique et culturelle de ces pays, jusqu’à ce que la société soviétique soit devenue bourgeoise dans ses cellules les plus minuscules.

La dégénérescence de la superstructure et en premier lieu, la transformation de la dictature du prolétariat en la dictature de la bourgeoisie, a été effectuée et utilisée par la clique renégate khrouchtchévienne pour des buts définis. La réalisation du processus a permis à cette clique de continuer la dégénérescence du système entier des rapports socialistes de production, sur une large échelle et à une allure rapide, à leur transformation en rapports capitalistes, jusqu’à la transformation capitaliste de la vie sociale entière de ces pays. La dégénérescence de la superstructure et la dégénérescence de la base économique en Union soviétique et dans les autres pays révisionnistes n’ont été, en aucun cas, des processus courts et immédiats, mais des processus prolongés, qui dans leur développement, se sont interconnectés et stimulés l’un avec l’autre. Le résultat de tous ces processus fût la dégénérescence complète des rapports de propriété, de distribution, d’échange et de gestion, de rapports socialistes à des rapports capitalistes.

Le coeur de tout le processus régressif de la démolition des rapports socialistes de production en Union soviétique et dans les autres pays révisionnistes, est la dégénérescence des rapports de propriété, la transformation de la propriété socialiste en une propriété capitaliste d’un type nouveau. « Le changement du caractère du parti et de l’État, la transformation contre-révolutionnaire dans le domaine de la superstructure politique et idéologique » nous apprend le camarade Enver Hoxha, ne pouvait que réussir à nous mener aussi au changement de la base économique du socialisme. » (Enver Hoxha, Rapport au 6ème Congrès du PLA, p. 229). »

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Comme on peut le voir, la primauté de la superstructure sur l’infrastructure y est clairement indiquée, mais en même temps, il y a bien une tentative de rétablir un peu de dialectique en trouvant tout de même quelques causes économiques et sociales antérieures, notamment concernant la fourchette des rémunérations et le principe de l’intéressement.

Au delà d’un débat évidemment nécessaire sur ce sujet, comme indiqué dans notre article, on ne peut pas manquer de constater ici une contradiction avec l’affirmation « historique » que l’URSS de Staline était égalitaire au point qu’ils s’en revendiquent par ailleurs sur ce plan, passage de notre article qui a donc été supprimé !!

Dans une polémique plus récente, avec le camarade militant du RCC-CHB, la question du « capitalisme d’Etat », abordée dans cet article, est également revenue au premier plan.

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2017/08/16/heritiers-doctobre-quelques-elements-au-debat/

Il se trouve que dans le même rapport, en 1971, Enver Hoxha introduit la notion de « Capitalisme d’État », d’un type « nouveau », certes, mais précisément bien en tant que système économique et mode de production en soi, d’un type nouveau, donc… Est-ce un autre « développement créatif » du marxisme ? C’est bien ce qu’il semble, comme on va le voir.

Pour moi il est clair, pourtant, tel qu’exposé par Lénine dès 1918, mais reprécisé en 1921, et même, du reste, cité par le camarade WH, que…

« …le capitalisme d’État dans une société où le pouvoir appartient au capital, et le capitalisme d’État dans l’État prolétarien, sont deux notions différentes. Dans la société capitaliste, le capitalisme d’État est reconnu par l’État qui le contrôle dans l’intérêt de la bourgeoisie et contre le prolétariat. Dans l’État prolétarien, la même chose se fait au profit de la classe ouvrière pour lui permettre de résister à la bourgeoisie encore puissante et de lutter contre elle. « 
(Lénine, III° congrès de l’Internationale Communiste, Rapport sur la tactique du Parti Communiste de Russie, 5 juillet 1921   https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1921/07/vil19210705.htm        )

De cette approche léniniste évidente découle le fait que le « capitalisme d’État » n’est ni un mode de production ni un système économique en soi, mais simplement un aspect ambivalent de relation entre l’état et l économie que l’on peut retrouver dans l’un et l’autre système, et donc sous le socialisme dans la phase de transition.

Le fait qu’Enver Hoxha en fasse un mode de production et un système économique en soi se trouve effectivement confirmé par le fait qu’il y voit également la base d’un impérialisme, par contre d’un type supposé classique, apparemment, et contrairement à une terminologie couramment répandue par nos ML français :

« L’Union Soviétique est devenue aujourd’hui une puissance impérialiste qui poursuit une politique agressive. De base de la révolution mondiale qu’elle était, l’Union Soviétique s’est transformée en une base de la contrerévolution.

Tout cela montre que l’Union Soviétique actuelle ne peut plus s’appeler pays socialiste, mais Etat capitaliste et puissance impérialiste. »

 

Le terme « social-impérialiste », dont la définition léniniste n’est pas différente, de toutes façons, n’apparait que de façon très minoritaire, dans son propos.

 

 

 

Dans « l’impérialisme et la révolution », en 1978, il donne une définition somme toute très classique de l’impérialisme, reprise de façon très proche sur celle de Lénine, mais cela ne l’empêche nullement d’y assimiler le « capitalisme d’État » d’URSS, qui, pour le coup, devient « monopoliste » au sens tout à fait classique du terme, cessant donc d’être d’un type « nouveau », sans que les moyens par lesquels ce capitalisme de type « nouveau » aurait développé une forme classique d’impérialisme ne soient clairement expliqués. Il y a donc de fait, création, ici aussi d’une nouvelle approche d’un supposé phénomène « impérialiste » dont la définition reste, manifestement et pour l’essentiel, dans le non dit, pour ne pas rentrer en conflit avec l’originale marxiste-léniniste…!!

« Le capitalisme monopoliste d’Etat, qui représente le plus haut degré de concentration de la production et du capital, est la forme principale de propriété qui domine aujourd’hui en Union soviétique et dans les autres pays révisionnistes. Ce capitalisme monopoliste d’Etat est au service de la nouvelle classe bourgeoise au pouvoir. »

http://ciml.250x.com/archive/hoxha/french/enver_hoxha_imperialisme_et_la_revolution.pdf

 

Or la définition du capitalisme monopoliste d’État suppose la domination du capital financier sur le capital productif, et il se trouve que le capitalisme financier en Russie n’y a pas fait son apparition avant la chute de l’URSS, et encore, sur une base très réduite, et qui a même continué de se réduire considérablement ces dernière années, ramenant la puissance financière de la Russie sensiblement au niveau de celle de l’Espagne !

 

Il faudrait donc, là aussi, arriver à une nouvelle définition du capital financier, qui serait encore une création de plus de la part d’Enver Hoxha, mais on ne la trouve pas non plus, au delà d’une simple rhétorique gauchiste assimilant « monopole » et « État » !

 

De plus, l’étude concrète du phénomène capitaliste en URSS a montré précisément le contraire d’une concentration des forces productives. La base économique et sociale du révisionnisme et de la restauration du capitalisme est clairement un résultat de leur déconcentration et de la formation de baronnies bureaucratiques et maffieuses essentiellement d’implantations locales, et cela non seulement jusqu’au moment de la chute de l’URSS, mais encore dans les années qui ont suivi.

Il ne s’agit évidemment pas ici de mettre en doute la sincérité révolutionnaire du camarade Enver Hoxha, ni même, les apports bien réels et même considérables qu’il a fait à la critique du révisionnisme en général et du révisionnisme maoïste en particulier, mais de constater néanmoins que certains aspects de sa critique du révisionnisme en URSS sont peu opérationnels, sinon carrément contre-productifs, tant en termes d’analyse que d’agit-prop, et restent marqués par l’emploi, même si différent, de la rhétorique gauchiste initialement remise au goût de l’époque par les maoïstes, qui l’avaient eux-même reprise du gauchisme plus ancien, et principalement bordiguiste.

 

Luniterre

 

Récemment parus sur TML, d’autres éléments du débat:

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2017/08/06/de-la-nature-de-classe-de-la-contre-revolution-khrouchtchevienne-nouveau-debat-avec-locf/

 

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2017/08/05/prix-du-petrole-effondrement-des-cours-et-effondrement-dune-theorie-pseudo-marxiste-leniniste/

 

 

 

 

 

 

 

 

22 commentaires

  1. A reblogué ceci sur Reconstruction communiste Québecet a ajouté:
    Selon la théorie marxiste, il y a bien un rapport dialectique entre infrastructure et superstructure, mais ce rapport, basé sur l’observation des faits, de l’évidence sociale et économique , dit que le mouvement essentiel se fait de l’infrastructure vers la superstructure.

    C’est fondamentalement l’infrastructure, la base économique et sociale, les rapports de productions, qui conditionnent la superstructure, à savoir l’idéologie, la culture, le droit, l’organisation politique, dont l’État, et non l’inverse.

    Évidemment, la dialectique implique aussi un mouvement en sens inverse, à savoir que la superstructure influe en retour sur l’infrastructure, mais ce mouvement n’a que très rarement une influence dominante, et surtout, durable.

  2. Une telle analyse s’approche de beaucoup de l’analyse de Trotsky.
    Evidement que la dégénérescence politique a une base économique et sociale. Sociale surtout, car ce sont les secteurs privilégiés d’un « mauvais développement » (comme l’a caractérisé J.Sapir et d’autres) qui nécessitaient tout d’abord la fin de la terreur (qui le visait principalement) donc la stabilité de leurs privilèges et après la suite, c’est à dire la marche vers le capitalisme, la possibilité de posséder en propre et de léguer leurs « avoirs », leurs baronnies, leurs rapines et pillages de la société soviétique.
    Trotsky avait prédit que sans une révolution politique qui rétablisse la démocratie au parti et dans la société la marche vers le capitalisme était la seule autre alternative (La Révolution Trahie, conclusions).
    Enver Hodxa, empêtré dans la « construction du socialisme dans un tout petit pays très arriéré, voyait clair mais ne pouvait pas le dire, car attaquer la dégénérescence de l’URSS par le fait de montrer du doigt les privilèges et la gestion capitaliste de la bureaucratie toute puissante et toute corrompue, c’était pointer du doigt le chef de la bureaucratie, Staline et justifier, directe ou indirectement tout l’analyse de Trotsky: l’impossibilité de la construction du socialisme dans un seul pays et les conclusion de la Révolution Trahie.
    La « voie » d’Enver était parfaitement impossible et son système, complètement idéologique s’est effondré en dehors du courant de l’économie mondiale. L’autarcie était bonne pour les premières étapes du féodalisme mais au XXI siècle…il subi les lois implacables de l’Histoire…c’est à dire du capitalisme avancé.
    Que le mouvement M.L. s’approche, petit à petit, de ces conclusion…que l’on ne peut que trouver justes, montre deux choses: que les ML cherchent honnêtement de l’une et de deux qu’ils n’arrivent pas à s’unir et avancer parce que cette critique n’a pas été amenée jusqu’à la fin.
    Bien sur, la mention de Trotsky va faire ressurgir des réflexes et des préjugés, mais les faits sont têtus et je ne peux que les constater.
    C’est d’ailleurs ce qui font en filigrane, sans vouloir le reconnaitre, tant E.Hodxa comme Luniterre.
    Autrement on jette le marxisme à la poubelle et l’on s’inscrit à la pensée idéaliste où l’histoire est faite par les grands hommes et les belles idées (ou les mauvaises). L’étude des fait coince les personnes honnêtes et les conduit où d’autres jadis avaient tiré les mêmes conclusions. C’est un devoir de le reconnaitre.

    1. Dans le chapitre de « la révolution trahie » consacré à l’économie,

      https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/revtrahie/frodcp4.htm

      Trotsky ne propose rien d’autre que le retour de l’établissement des prix selon la loi de l’offre et de la demande, c’est à dire le rétablissement de la loi du marché comme principe économique de base, et donc le rétablissement pur et simple du capitalisme, en pratique, même si assez habilement dissimulé derrière un verbiage gauchisant.

      En fait, il suffit de lire ce texte attentivement, en gardant à l’esprit les catégories de l’analyse marxiste, pour s’en apercevoir rapidement.

      C’est le cas dans tous les textes de Trotsky sur le sujet d’ailleurs, ce qui a amené très logiquement « Pablo » (Michel Raptis) trotskyste historique parmi les membres fondateurs de la prétendue « IVème internationale » à défendre l’idée que Trotsky était partisan d’un « socialisme de marché »… C’est à dire une position tout à fait sociale-démocrate de collaboration de classe, en pratique.

      Pratique qui est finalement celle des trotskystes, sur le terrain, dès qu’ils arrivent avoir une relative influence…
      Et même parfois, bien avant…

      Alors que le sujet de l’article, ici, fait une suite logique aux précédentes études sur le rapport entre la base économique et sociale de la restauration du capitalisme et son expression dans les superstructures, sous la forme du révisionnisme khrouchtchévien.


      Soit l’antithèse de la démarche de Trotsky, qui fait précisément l’apologie, en pratique, de la restauration de cette base, sous des dehors de critique « de gauche »…

      Dommage, camarade, que tu te laisses prendre à cette rhétorique!

      Quant à la critique hoxhaïste, juste sur certains points essentiels, notamment à l’égard du maoïsme, elle présente le travers gauchiste de retourner à nouveau la dialectique dans un sens idéaliste en privilégiant le rôle des superstructures, dans l’analyse comme dans la démarche pratique, par rapport à celui des infrastructures.

      Effectivement elle tend à justifier un isolationnisme manifestement excessif par rapport au rapport de forces, qui se dégrade au fil des ans. Toutefois, dans le contexte d’une résistance anti-impérialiste encore farouche de la part de bon nombre de bourgeoisies nationales bureaucratiques, et en tenant compte de son potentiel élevé en ressources naturelles, en rapport de sa modeste taille, le sort de l’Albanie n’était pas forcément la capitulation!

      Encore fallait-il faire une analyse de classe correcte des bourgeoisies nationales bureaucratiques encore en lutte contre l’impérialisme US et situer justement la place du prolétariat albanais dans cette lutte.

      On ne peut pas refaire l’histoire, mais c’est, ipso-facto, la question qui se pose dans ce genre de situation, et elle n’est pas purement académique, dans la mesure où ce genre de situation peut se reproduire avec la victoire isolée d’une révolution isolée dans un petit pays. Il s’agit de conserver une intégrité idéologique basée sur une infrastructure économique de transition socialiste, tout en pratiquant des échanges économiques avec les régimes bourgeois nationaux-bureaucratiques en résistance contre l’impérialisme US et ses valets, et déjà, dans bien des cas, contre le social-impérialisme chinois.

      Luniterre

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